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Chroniques d'aïeux... de Bresse et d'ailleurs...
1 juin 2019

Marie, Gabriel et Emile... Pupilles de la Nation

En 1917, l’État se soucie de l'avenir des enfants des soldats morts au combat ou gravement blessés. Le 27 juillet, une loi fonde l'Office national des Pupilles de la Nation dont le rôle est de leur venir en aide jusqu'à leur majorité. L'institution se déploie sur le territoire par la création d'offices départementaux. Celui de Saône-et-Loire voit le jour le 10 mars 1918.

Le statut de Pupille de la Nation est attribué par décision des tribunaux de première instance. Elle est rendue sur requête des familles qui, avec le soutien des mairies, constituent un dossier prouvant la filiation de l'enfant avec le père mort pour la France ou invalide de guerre. La décision se matérialise notamment par l'apposition d'une mention marginale sur l'acte de naissance de l'enfant adopté par la Nation. Jusqu'à sa majorité, la pupille peut compter sur le soutien financier de l'État, par l'attribution d'aides.

Récemment, en recevant la copie intégrale de l'acte de naissance de ma grande-tante Marie Eugénie CHEVREY, je découvre la mention marginale qui nous indique son adoption par la Nation, par jugement du tribunal de Chalon-sur-Saône rendu le 14 mai 1930. D'après sa fiche matricule, mon arrière-grand-père Gabriel CHEVREY a en effet participé à la Grande Guerre du 2 août 1914 au 23 mars 1918, affecté à la 8e section des infirmiers militaires. Pour des raisons médicales, la commission de réforme de Dijon le reconnaît inapte à faire campagne le 22 décembre 1917. Une bronchite chronique provoque sa réforme temporaire le 23 mars 1918, renouvelée le 14 janvier 1919, puis le 21 janvier 1920. Le 10 mai suivant, il est réformé définitivement.

Toutes ces informations n'expliquant pas les motivations du jugement d'adoption par la Nation, je me suis donc mis en quête de nouveaux documents pour en comprendre les raisons.

La recherche débute par la consultation de la base des Pupilles de la Nation de Saône-et-Loire, mise en ligne par les Archives départementales. J'apprends alors que Marie Eugénie n'est pas la seule pupille, ses frères Gabriel Jean et Emile Louis sont également adoptés par la Nation. La poursuite des recherches se déroule en salle de lecture des Archives départementales, où deux sources sont disponibles : les jugements d'adoption par la Nation rendus par les tribunaux (série U) et les dossiers de suivi des pupilles par l'Office départemental (série R).

La bronchite chronique dont souffre Gabriel est reconnue comme maladie contractée durant ses services militaires, provoquant son invalidité partielle. De ce fait, ses enfants nés durant sa période d'engagement militaire (avant le 10 mai 1920, date de sa réforme définitive) peuvent être reconnus comme Pupilles de la Nation. Le 22 mars 1930, par l'intermédiaire du juge de paix des cantons de Verdun-sur-le-Doubs et de Saint-Martin-en-Bresse, Gabriel adresse une requête au tribunal de Chalon-sur-Saône afin d'obtenir l'adoption par la Nation de ses trois premiers enfants.

AD71_3U 3725 (6)Requête pour l'adoption par la Nation de Marie CHEVREY (Archives départementales de Saône-et-Loire, 3U 3725).

Dans la note accompagnant le dossier qu'il transmet le 8 avril 1930 au Procureur de la République de Chalon, le juge de paix n'est pas favorable à cette requête. Il estime que "la situation de fortune de Chevrey (immeubles : 20.000f, matériel : 5.000f, 6 têtes de gros bétail, 2 porcs - Impôts 240f, fermage 2.000 f) il peut subvenir à ses obligations et charges de famille", et ajoute que "l'étendue de l'exploitation est de 9 hectares environ et Chevrey n'a pas de domestiques."

Le tribunal de Chalon, dans son audience publique du 14 mai 1930, ne tient pas compte de l'avis du juge de paix et pronnonce l'adoption par la Nation de Marie Eugénie, Gabriel Jean et Emile Louis CHEVREY.

AD71_3U 3725 (1)

AD71_3U 3725 (2)Jugement d'adoption par la Nation des enfants CHEVREY (Archives départementales de Saône-et-Loire, 3U 3725).

Suite à ce jugement la mention d'adoption est apposée sur chacun des trois actes de naissances des pupilles. Gabriel et Marie peuvent désormais prétendre à l'obtention d'aides de l'Office départemental des Pupilles de la Nation où un dossier a été ouvert pour chacun de leurs trois enfants. Ces dossiers peuvent nous apporter quelques renseignements sur la vie des pupilles, jusqu'à leur majorité. Pour Marie et Emile, ils ne nous donnent pas beaucoup d'informations, contenant peu de pièces (ils n'ont visiblement pas fait l'objet d'aides spécifiques). En revanche, pour leur frère Gabriel, nous pouvons suivre sa période d'apprentissage subventionnée par l'office départemental.

Lorsque la pupille atteint l'âge de 13 ans, l'office départemental via sa section cantonale se renseigne sur son avenir auprès de ses parents. Dans le questionnaire complété par son père et visé par le président de la section le 25 août 1931, on apprend que Gabriel Jean ne va plus à l'école depuis le 1er juin, qu'il n'a pas le certificat d'études, qu'il travaille aux champs avec son père et que ses parents souhaitent le mettre en apprentissage au métier de charron et forgeron.

Le 6 août 1934, un premier contrat d'apprentissage est signé, mais Gabriel a changé de voie et se dirige vers le métier de boucher. Il a alors pour patron Pierre GRANGER, boucher au 6 grande rue Saint-Cosme à Chalon-sur-Saône, chez qui il est placé depuis le 3 avril 1934. Le 22 octobre 1934, suite à une cessation d'activité de son premier patron, Gabriel poursuit son apprentissage chez Eugène GIROUX, boucher au 22 rue aux Fèvres, toujours à Chalon, avec qui un contrat est signé le 8 février 1935. Pour chacun de ses contrats d'apprentissage, l'Office départemental des Pupilles de la Nation accorde une subvention de 40 francs à Gabriel.

AD71_3R500_Dossier 14107 (16)Contrat d'apprentissage de Gabriel CHEVREY, chez Eugène GIROUX, boucher à Chalon-sur-Saône (Archives départementales de Saône-et-Loire, 3R 500 - Dossier 14107).

Suite à son apprentissage, Gabriel CHEVREY va poursuivre dans son métier de boucher, notamment en ouvrant son propre commerce à Charnay-lès-Mâcon.

Album-GUYENOT_282Gabriel Jean CHEVREY.

Merci à Françoise et Lionel qui photographient pour moi les documents utiles à mes recherches aux Archives départementales de Saône-et-Loire.

 

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  • Récits de la vie de mes aïeux et de leurs collatéraux, et histoire des lieux où ils ont vécu, en Bresse bourguignonne et ailleurs. Chroniques écrites au fil de mes recherches généalogiques et de mes découvertes...
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